Christiane
Singer
4e
de couverture :
« Je
ne sais si vous avez eu le terrifiant privilège de connaître la
passion d’amour.
C’est
le plus vertigineux des abîmes dans lequel il soit possible à
l’homme de descendre.
Un
abîme de flemmes et de souffrances. »
L’auteur :
Christiane
Singer,
femme
de lettre française,
est née à Marseille en 1943, d’un père juif hongrois et d’une
mère moitié russe, moitié tchèque qui s’installèrent en France
pour fuir la persécution.
Après
le lycée, elle entre au conservatoire de diction et d’art
dramatique de Marseille, puis suit des études de lettres à
Aix-en-Provence. Elle en sort avec un doctorat de Lettres Modernes.
En
1968, elle épouse le Comte Georg von Thurn-Valassina et s’installe
avec lui dans son château médiéval de Rastenberg, près de Vienne
(Autriche).
Lectrice
à l’université de Bâle et chargée de cours à celle de
Fribourg, elle s’intéresse particulièrement au développement
personnel et suit l’enseignement autour des sagesses orientales de
l’un des disciples de Jung, Graf Karlfried.
Toute
son œuvre est traversée par un besoin de transmettre l’essentiel :
la prise en compte du spirituel dans le quotidien.
Atteinte
d’un cancer incurable, lorsque son médecin lui annonce, en
septembre 2006, qu’il ne lui reste que six mois à vivre, elle
rédige « Derniers
fragments d’un long voyage »,
un journal qui raconte la façon dont elle vit cette épreuve.
Christiane
Singer est
décédée le 4 avril 2007 à Vienne (Autriche), à l’âge de 64
ans.
Mon
avis :
C’est
d’une nouvelle de trois pages, la trente-deuxième de l’Heptaméron
de Marguerite de Navarre qu’est né ce roman. Christiane
Singer
a quinze ans lorsqu’elle lit cette nouvelle. Elle en gardera toute
sa vie « la hantise de vivre à plat. » Nihil
nisi ardeat !
Seul
ce qui brûle !
Le
moins que l’on puisse dire est que ce roman est écrit d’une
plume ardente !
Le
point de départ, c’est la visite inopinée d’un noble français
du
nom de Bernage
contraint
de demander l’hospitalité
dans la demeure autrichienne de
Sigismund d’Ehrenburg. Il y découvrira une situation qui le
poussera à interroger son hôte. De cette discussion, le maître de
maison trouvera matière à sortir
de son enfermement…
On
apprend cela en quelques lignes, le reste du livre est formé de
quatre lettres − deux de Sigismund, deux de son épouse −,
envoyées au sieur Bernage.
Christiane
Singer
a retranscrit dans un français moderne le ton et les mots du
quinzième siècle (époque où se situe l’histoire) pour donner
voix à chacun des protagonistes. Ils nous racontent tour à tour
leur histoire et la
façon dont les événements ont provoqué la situation que le sieur
Bernage découvre. Ils nous confient leurs sentiments les plus
intimes à ce propos, et leur disposition d’esprit dans ce présent
aliénant. Chacun porte un regard qui lui est propre, mais les deux
ont un point en commun : la passion.
Pour
l’homme, cette passion est dévorante, et l’entraîne vers une
forme de folie. Elle
devient ses œillères qui l’obligent à rester sur ce même chemin
douloureux dont il ne sortira que grâce à l’intervention de ce
visiteur impromptu qui lui ouvrira les yeux.
Pour
la femme, cette même passion sera son élixir de vie, ce qui
l’empêche de sombrer dans une autre folie, plus profonde et
probablement létale. Elle y puisera la force de supporter sa
condition de prisonnière et trouvera une forme de sagesse, mais la
frontière n’est-elle pas extrêmement ténue entre abandon et
résignation ?
Le
cheminement de pensée des deux personnages est évidemment marqué
par leur époque et l’omniprésence de la religion, de même que
l’écriture de Christiane
Singer
est sous-tendue par ses propres préoccupations, par sa philosophie
construite de sagesse orientale et de pensée chrétienne. Chaque
lecteur aura donc sa lecture personnelle de cet ouvrage en fonction
de ses convictions, mais quoi qu’il en soit, il trouvera dans ce
court roman une écriture brillante autant
que brûlante, où la sincérité de pensée de l’auteur
transparaît à chaque page.
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