Yasmina
Khadra
4e
de couverture :
L’Olympe
des Infortunes est un terrain vague coincé entre une décharge
publique et la mer, où se décomposent au soleil des dieux déchus.
Il y a Ach le borgne, qui sait mieux que personne magnifier les
clochards ; Junior le Simplet ; Mama la Fantomatique :
le Pacha et sa cour de soûlards, et bien d’autres personnages
encore, aussi obscurs qu’attachants. C’est un pays de mirages et
de grande solitude où toutes les hontes sont bues comme sont tus les
plus terribles secrets.
À
travers ce voyage philosophique, Yasmina
Khadra
nous propose une escale dans l’univers des paumés ; un
univers fait de tendresse et de cocasseries, de rêves
invraisemblables et de possessions abusives où surgissent, parfois,
de cuisantes questions sur le Mensonge et la Culpabilité.
L’auteur :
Yasmina
Khadra, de son vrai nom Mohammed
Moulessehoul, est
né en janvier 1955 à Kenadsa, dans le Sahara algérien. Il
a neuf ans quand son père, officier de l’ALN,
l’envoie à l’école des cadets de la révolution. Sa carrière
est tracée, il sortira sous-lieutenant de l’Académie militaire
interarmes de Cherchell, puis servira comme officier pendant
vingt-cinq ans dans l’armée algérienne. En 2000, il fait valoir
ses droits à la retraite et quitte l’armée pour se consacrer à
l’écriture. Il n’avait néanmoins pas attendu ce départ
pour coucher sur le papier
ses premiers textes, mais sa vie de militaire l’avait obligé à
une certaine clandestinité. Après avoir publié sous différents
pseudo, il opte définitivement pour celui-ci, formé des deux
prénoms de son épouse, et sous lequel paraît en France Baleine,
Morituri (1997) qui le
révèle au grand public.
« Mon
épouse m’a soutenu et m’a permis de surmonter toutes les
épreuves qui ont jalonné ma vie. En portant ses prénoms comme des
lauriers, c’est ma façon de lui rester redevable. Sans elle,
j’aurais abandonné. C’est elle qui m’a donné le courage de
transgresser les interdits. Lorsque je lui ai parlé de la censure
militaire, elle s’est portée volontaire pour signer à ma place
mes contrats d’édition et m’a dit cette phrase qui restera
biblique pour moi : “Tu m’as donné ton nom pour la vie. Je
te donne le mien pour la postérité”. »
Porter
un pseudonyme féminin, pour un homme, est une véritable
provocation, dans un milieu aussi conservateur que le monde
arabo-musulman. Au-delà d’un nom de romancier, ce choix est avant
tout un acte engagé. On retrouve dans l’ensemble de son œuvre ce
regard critique qu’il porte sur son pays et la société dans
laquelle il a grandi, mais loin de se laisser éblouir par le miroir
aux alouettes de l’occident, il illustre
aussi le dialogue de sourd qui sépare ces deux univers.
Yasmina
Khadra a reçu de multiples prix
littéraires, aussi bien en France que dans le reste de l’Europe,
certains pays africains ou aux États-Unis. Il a été fait Chevalier
de la légion d’honneur en France et a eu également d’autres
distinctions comme l’Ordre des Arts et des Lettres, la Médaille de
Vermeil de l’Académie française.
Mon
avis :
Yasmina
Khadra a
publié plus de trente romans, dont certains, comme Les
hirondelles de Kaboul,
Morituri,
L’attentat
ou Ce que le jour doit à
la nuit ont été adaptés
au cinéma, au théâtre ou en film d’animation (Les hirondelles de
Kaboul). Je suis loin d’avoir lu l’intégralité de son œuvre,
mais chaque fois que j’ai
ouvert l’un de ses livres, je l’ai refermé pleinement ravi.
L’Olympe
des infortunes
ne fait pas exception.
Dans
ce roman, l’auteur nous emmène à la marge de la société, au
milieu d’un groupe
d’exclus qui
survivent entre une décharge et les rives d’une mer incertaine.
L’absurdité de leur situation n’est
pas sans rappeler « En
attendant Godot »,
car comme dans la pièce de Beckett,
les deux principaux personnages de ce roman semblent
attendre quelque chose. Et pourtant, ils ne sont que dans l’instant,
n’ayant pas de projet autre que survivre loin d’une société
qu’ils rejettent, peut-être pour mieux supporter leur bannissement
de celle-ci.
Chacun,
ici, a de bonnes raisons pour ne pas retourner « en ville »,
mais en vérité, sont-ce ces raisons qui le retiennent dans ce « no
man’s land » ou bien se les est-il forgé pour supporter d’y
rester ?
À
travers
ces marginaux, exilés
volontaires autant que victime d’un système qui broie l’individu,
Yasmina Khadra
nous interroge encore une fois sur la place de l’humain dans un
monde mercantile, mais également sur ce que pèsent nos faiblesses
dans nos décisions. Mais
le talent de l’auteur, c’est de nous décrire ce monde de
déshérités sans jamais tombé dans le misérabilisme. La situation
précaire des différents protagonistes sert le récit autant que le
propos, et
c’est ce qui donne toujours cette profondeur à ses écrits.
Yasmina
Khadra
est, pour moi, un auteur incontournable dont il faut avoir lu au
moins un livre. Mais je gage que quand on y a goûté, on y revient
forcément !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire