Le dictionnaire de Lemprière


Lawrence Norfolk
Traduit de l’anglais par André Zavriew




4e de couverture :
Venu à Londres récupérer l’héritage de son père, l’érudit Lemprière se retrouve lié à un pacte séculaire lui garantissant des parts de la Compagnie des Indes. Un legs inestimable qui a conduit ses ancêtres vers un sombre destin. Obnubilé par son travail sur la mythologie grecque, il s’en détourne. Jusqu’à ce que l’Histoire le précipite avec un cruel sens de l’ironie au cœur d’une impitoyable conspiration.


L’auteur :
Lawrence Norfolk est un romancier britannique né à Londres le premier octobre 1963. Peu après sa naissance, son père, ingénieur, est amené à aller travailler en Irak où il emmène toute sa famille. Ils en partiront en 1967, lors de la guerre des Six Jours, pour s’installer dans le West Country.
En 1986, il obtient un diplôme en littérature anglaise au King’s College de Londres avant de rédiger une thèse de doctorat sur le poète John Ashbery.
Il entame ensuite une carrière de journaliste et de rédacteur indépendant. Il participe également à des émissions culturelles pour Saturday Review et Front Row de la BBC.
Il se fait connaître en tant qu’écrivain par ses romans historiques riches en détail, aux intrigues fouillées servies par un vocabulaire d’une rare richesse.
En 1992, son premier roman − Le dictionnaire de Lemprière − reçoit le prix Somerset-Maugham.


Mon avis :
Voici un roman que vous ne lirez pas d’un seul tenant, même s’il vous rend accro dès les premiers paragraphes. Pas seulement à cause de ces quelque sept-cent-vingt pages (dans sa version poche), mais surtout à cause de la rare densité de son texte. C’est bien simple, il ne me vient aucun exemple d’un autre auteur qui m’ait donné une telle sensation de foisonnement. Lorsque vous vous retrouvez, à la suite du jeune Lemprière, dans la foule d’un marché de Londres, vous avez l’impression quasi physique de devoir jouer des coudes pour avancer, tellement la scène est à la fois fouillée et vivante. Ne craignait pas cependant de longues descriptions bourrées de détails, car si détails il y a, ils ne sont jamais lourds ou indigestes, mais participent à la netteté de la visualisation de l’instant décrit. L’auteur utilise avec précision un vocabulaire varié sans jamais aller vers une érudition ampoulée ni nous obliger à ouvrir un dictionnaire toutes les dix pages. Enfin, pour cette dernière affirmation, ça dépend de votre culture générale, mais malgré sa richesse, cela reste abordable à un vaste lectorat.
Au-delà du style de Lawrence Norfolk, on retiendra surtout la force créatrice de son imagination, car s’il s’est inspiré d’un jeune universitaire bien réel − John Lemprière a réellement existé et écrit un dictionnaire −, l’auteur nous entraîne dans un dix-huitième siècle où le fantastique transparaît par petites touches dans un monde farfelu et baroque, peuplé de personnages extravagants et savoureux.
Tout à la fois intrigue policière, roman historique (fictif) et fresque sociale à l’humour omniprésent, Le dictionnaire de Lemprière devrait réjouir les lecteurs les plus exigeants.
Notons toutefois que le plaisir est quelque peu gâché par une traduction pas toujours à la hauteur et surtout un manque de relecture indigne d’une collection nommée « Grands Romans ». Cela pour la version poche parue chez Points. La première édition brochée était sortie chez Grasset, mais dans la même traduction. Ont-ils été moins chiches sur le salaire des « petites mains » ? Je l’ignore, mais c’est une tendance générale chez les éditeurs de ne plus payer des relecteurs, alors je ne suis pas sûr que ça vaille le coup de payer le prix fort pour un ouvrage où l’on trouve quelques erreurs de traduction et surtout des accents sur des « e » en fin de mot, censés être muets… entre autres joyeusetés orthographiques !

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