La saison des ouragans



Fernanda Melchor
Traduit de l’espagnol (Mexique) par Laura Alcoba





4e de couverture :
Dans le canal d’irrigation, aux abords du village de La Matosa, un groupe d’enfants découvre le corps sans vie de la Sorcière. Les hommes avaient l’habitude de se rendre chez elle pour y trouver du plaisir et les femmes pour y chercher leur liberté. Dans cette Chronique d’une mort annoncée, nous remontons le fil des événements pour faire connaissance avec les trois coupables présumés : Luismi, dont la petite amie avait été admise à l’hôpital en raison d’importants saignements après sa visite chez la Sorcière ; Munra qui était au volant du camion ayant transporté le cadavre le jour du meurtre ; et Brando, dont la misogynie et l’homophobie obsessionnelles semblent n’avoir aucune limite. Autant de perspectives qui racontent la misère, la drogue et la violence, en ce mois de mai où l’étouffante chaleur annonce une saison des ouragans féroce…
S’inspirant d’un fait divers, Fernanda Melchor dresse un formidable portrait du Mexique contemporain et de ses démons. Grâce à la puissance de sa plume, elle dépeint la brutalité de la société en s’intéressant à l’une des figures féministes les plus fantasmées et les plus persécutées à travers les âges, la Sorcière.


L’auteur :
De son nom complet, Fernanda Melchor Pinto, l’auteure, née en 1982 à Veracruz (Mexique), est diplômée en journalisme à l’Université Veracruzana. Elle se fait connaître en publiant des nouvelles dans des revues littéraires mexicaines, puis un premier roman − Aqui no es Miami − en 2013.
La saison des ouragans (Temporada de Huracanes) est son deuxième roman, le premier traduit en français.


Mon avis :
Comme une épreuve sportive, La saison des ouragans est un roman qu’on n’aborde pas sans échauffement, sous peine de n’en pas voir le bout. Et pour rester dans le thème de comparaison, sa lecture se rapproche plus de la course de fond que du sprint.
Chaque chapitre se présente comme un long paragraphe durant lequel les phrases se suivent à un rythme soutenu, aussi serrées que le peloton d’un marathon pendant les premiers kilomètres. Au début, on se demande quand on va pouvoir reprendre son souffle, puis, comme toujours dans ce genre d’épreuve, on trouve son pas, sa cadence, et on avance en accord avec le paysage littéraire qui défile. Et quel paysage !
Avec une écriture nerveuse, presque à l’arraché, Fernanda Melchor nous projette dans un Mexique bien loin des plages de Cancún ou d’Acapulco. En effet, si le Mexique fait partie des vingt premières puissances mondiales, il est aussi parmi ceux où la disparité économique est la plus forte. Et les provinces les plus pauvres souffrent aussi d’un taux de criminalité extrêmement élevé, largement entretenu par le trafic de drogue, la prostitution et la corruption que tout cela engendre.
Dans ce Mexique où la misère et le crime organisé sont le quotidien d’une partie de la population, où les jeunes les plus défavorisés n’ont pour rêver que la drogue et l’alcool, cette chronique d’une mort annoncée se déroule dans une espèce d’urgence, de logorrhée presque névrotique. C’est âpre et brûlant, comme un bol de tequila le matin à jeun. Très vite, on attrape le tournis, certaines images deviennent mouvantes, nous tournent autour de manière lancinante ; l’environnement apparaît soudain comme déformé dans un miroir de foire et les proportions semblent obéir à une échelle qui n’est pas la nôtre. Sans doute parce que les préoccupations des personnages sont d’une importance capitale : survivre… et trouver le moyen d’oublier un peu un présent trop oppressant. Fernanda Melchor nous place au plus près des protagonistes, de leur vie, de leur intimité ; elle en fait un récit sans concession ni jugement, et c’est ce qui fait la force de ce magnifique roman dont le New York Time a dit, à sa sortie, qu’il était « le plus grand roman mexicain de l’année. »

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