Mourir n'est peut-être pas la pire des choses


Pascal Dessaint





4e de couverture :
Toulouse, juin 2000.
Jéromine Gartner devait revenir chercher le petit Paul chez madame Jourda, or elle ne s’est toujours pas manifestée. Inquiète, la voisine alerte la police. Quand le capitaine Félix Dutrey arrive sur les lieux, il constate que la porte de l’appartement n’est pas fermée à clé. Aucune trace d’effraction ni de violence. Tout serait normal, hormis la présence de Jérômine Gartner, gisant dans un fauteuil, étranglée. Détail singulier : la climatisation est poussée au maximum et, après examen, on découvrira dans l’œsophage de la victime sept grains de riz et sept fragments de métal. Chargés de l’enquête, Dutrey et ses hommes s’efforcent de trouver des indices, de remonter des pistes.
Jéromine vivait seule, mais elle avait un frère, écrivain à succès, disparu en mer lors d’une tempête. Elle avait des amis : Cédric, Marthe, Suzanne, Simon. Un secret les avait liés à jamais. Et derrière ce secret, un autre encore. La clé de la mort de Jérômine.
L’ombre et la lumière. Les cases noires et blanches d’un échiquier où l’auteur déplace les pièces selon de savantes combinaisons. Telles sont les images qui naissent à la lecture de ce roman de Pascal Dessaint où se répondent tour à tour deux hommes et deux femmes.
Quatre voix, quatre points de vue pour raconter une histoire privée, celle des relations intimes et contradictoires, riches et douloureuses à la fois, qui unissent les personnages. Mais aussi pour dire l’histoire de notre planète et de toutes les espèces qui la peuplent, y compris la nôtre.
Par le biais de cette enquête où nous cheminons de révélation en révélation jusqu’à un flamboyant dénouement, Pascal Dessaint nous confronte aux enjeux majeurs des décennies à venir. Il signe ici un roman noir et lyrique dont la sincérité n’a d’égale que la portée.


L’auteur :
Pascal Dessaint est né à Dunkerque, le 10 juillet 1964, dans une famille ouvrière. Gamin, il n’avait pas le droit de regarder la télévision le soir. Sa mère disait que lire rendait moins bête, alors il lisait ! Il écrit son premier roman l’année de son bac, mais il lui faudra attendre dix ans avant de se voir publié. Entre-temps, il s’installe à Toulouse (en 1984) et arrête ses études (en 89) et survit en exerçant divers petits boulots comme veilleur de nuit, gardien de musée ou animateur radio.
En 1992, il publie enfin son premier roman : Les paupières de Lou. Beaucoup d’autres suivront, dont une participation à la série Le poulpe (Le pis rennais). Son dernier en date (En attendant Bukowski) est sorti en 2018. Pascal Dessaint a été distingué par le Prix Mystère de la critique en 1997 et 2008, le Grand prix de la littérature policière (2000), le Prix du roman noir français de Cognac (2006), le Prix Jean Amila-Meckert (2015) et le Prix Sang d’encre (2015).


Mon avis :
Si vous cherchez du polar pur et dur, vous pourriez être légèrement déçu. Il y a bien meurtre, dès les premières pages, et de ce meurtre découle bien une enquête… mais le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle n’est pas traitée de manière conventionnelle. D’ailleurs, le véritable sujet de ce roman choral n’est pas tant la mort de l’un des personnages, que le devenir de notre planète. Et si ce livre est sorti il y a déjà quinze ans, on constatera à quel point il est encore d’actualité, au moment où monsieur Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique, révèle le peu d’effet de tous nos « plans climat » et autres « bonnes volontés écologiques » face au monde de la finance et au modèle économique qui prédomine dans le monde.
Bien sûr, avec le capitaine Félix Dutrey, on démêle lentement l’écheveau de cette histoire dont le fil se perd dans un passé plus ou moins proche, mais ce sont surtout les voix des amis de la victime, Jéromine Gartner, qui vont nous conduire au cœur de cette histoire où passions et engagements, amitiés et petits mensonges façonnent les vies et les relations. Derrière cette camaraderie forgée autour d’une volonté commune de lutter pour sauvegarder la biodiversité, il y a des êtres qui sont peut-être finalement terriblement seuls…
Pascal Dessaint n’a pas écrit un roman sur un sujet dont on parle, il nous parle d’un sujet qui lui tient à cœur. Et ça fait toute la différence. La sincérité sublime ces lignes et transparaît à chaque instant. On se retrouve soudain assis autour d’un feu de bois, sous un ciel d’été, à partager nos doutes et nos espoirs avec les membres de cette tribu que formaient les amis de Jéromine. On les découvre, avec leurs forces et leurs faiblesses, on les aime ou on les déteste à cause de ça, mais quoi qu’il en soit, maintenant on les connaît, maintenant ils font partie de la famille et on ne peut plus être indifférent. C’est là la grande force de l’auteur : nous faire presque oublier qu’il s’agit d’un polar, pour mieux nous parler des catastrophes qui se préparent, et de l’impuissance de ceux qui lancent des signaux d’alerte que le monde refuse d’entendre. Et il le fait avec subtilité, sans jouer les émeutiers ni les donneurs de leçons. Même si le fil rouge de l’enquête policière est parfois caché par la trame, il est solide et c’est bien lui qui tire le récit vers son dénouement.
Traversé d’une lumineuse noirceur, ce récit à quatre voix met en perspective les faiblesses individuelles et celles de notre société. La mort de Jéromine, c’est son baisser de rideau, et pour comprendre ce qui a amené ce dernier acte, il faut connaître les précédents, avec tous les protagonistes. Car au fond, quelles qu’en soient les circonstances, une mort révèle toujours une vie, par le biais des souvenirs qui, comme les gaz libérés de la vase, remontent percer la surface. Et parfois, ça éclabousse !

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